Cour d'appel de Lyon, 3e chambre a, 17 novembre 2022, n° 19/03116
Sur la décision
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Juridiction : Cour d'appel de Lyon Numéro(s) : 19/03116Importance : Inédit Décision précédente : Tribunal de commerce de Lyon, 8 avril 2019, N° 2017j1092Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée Date de dernière mise à jour : 3 décembre 2022Lire la décision sur le site de la juridiction Sur les personnes
Avocat(s) :Isabelle JUVENETON, Marie-Christine MANTE-SAROLI, Jean-Denis GALDOS DEL CARPIO
Cabinet(s) :GALDOS & BELLON
Parties :Société LANG ET ASSOCIES RHONE ALPES c/ SARL SAINT GENIS AUTO SERVICES
Texte intégral
N° RG 19/03116 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MK7X Décision du Tribunal de Commerce de LYON Au fond du 08 avril 2019 RG : 2017j1092 ch n° Société LANG ET ASSOCIES RHONE ALPES C/ SARL SAINT GENIS AUTO SERVICES RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE LYON 3ème chambre A ARRET DU 17 Novembre 2022 APPELANTE : Société LANG ET ASSOCIES RHONE ALPES [Adresse 1] [Localité 2] Représentée par Me Marie-christine MANTE-SAROLI de la SELARL MANTE SAROLI & COULOMBEAU, avocat au barreau de LYON, toque : 1217 et ayant pour avocat plaidant Me Jean-Denis GALDOS del CARPIO du cabinet GALDOS & BELLON, avocat au barreau de PARIS INTIMEE : SARL SAINT GENIS AUTO SERVICES [Adresse 4] [Localité 3] Représentée par Me Isabelle JUVENETON, avocat au barreau de LYON, toque : 265 * * * * * * Date de clôture de l’instruction : 20 Janvier 2022 Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Octobre 2022 Date de mise à disposition : 17 Novembre 2022 Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : — Patricia GONZALEZ, président — Marianne LA-MESTA, conseiller — Aurore JULLIEN, conseiller assistés pendant les débats de Julien MIGNOT, greffier A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile. Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Patricia GONZALEZ, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. * * * * EXPOSÉ DU LITIGE La société Rhônexpert, devenue la SAS Lang et Associés exerçant sous le nom Polygone Expertise (ci-après Société Lang et Associés), a pour activité l’expertise automobile pour le compte de ses clients : compagnies et mutuelles d’assurances. La SARL Saint-Genis Auto Services (ci-après Société SGAS) est spécialisée dans la réparation et l’entretien de véhicules automobiles légers. Membre du réseau Nobilas, elle est mandatée pour des sinistres de véhicules par plusieurs compagnies d’expert automobiles, dont la Société Lang et Associés. Par lettre recommandée du 12 novembre 2016, suite à plusieurs différends concernant la tarification des réparations, la Société SGAS a dénoncé plusieurs manquements de la part de la Société Lang et Associés et a sollicité l’indemnisation des différents préjudices prétendument subis. Par courrier en réponse du 23 novembre 2016, la Société Lang et Associés n’a pas donné suite aux demandes d’indemnisation de la Société SGAS. Par acte d’huissier de justice du 12 juin 2017, la Société SGAS a fait assigner la Société Lang et Associés en responsabilité et en indemnisation de plusieurs préjudices : d’un premier préjudice constitué par une perte financière de 6.677,78 euros TTC, d’un deuxième préjudice commercial d’image lié au discrédit jeté sur le garage auprès de ses mandants et sa clientèle estimé à 8.000 euros, d’un troisième préjudice lié à la perte de temps dans la gestion administrative des différents dossiers pour un montant de 9.558 euros TTC et d’une dernière somme de 4.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Par jugement du 8 avril 2019, le tribunal de commerce de Lyon a : — débouté la société Rhônexpert de sa demande de prescription des dossiers [N], [M], [V], [L] et [O], — condamné la société Rhônexpert à payer la somme de 9.502,86 euros TTC au titre du préjudice financier subi par la société Saint Genis Auto Services, — débouté la société Saint Genis Auto Services de sa demande au titre d’un préjudice commercial, — condamné la société Rhône Expert à payer la somme de 2.832 euros TTC au titre du préjudice de perte de temps dans la gestion administrative, — ordonné l’exécution provisoire du présent jugement, — condamné la société Rhônexpert à payer la somme de 3.000 euros à la société Saint Genis Auto Services au titre de l’article 700 du code de procédure civile, — condamné la société Rhônexpert aux entiers dépens. La société Rhônexpert (devenue la Société Lang et Associés) a interjeté appel par acte du 2 mai 2019 en ce que le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 8 avril 2019 a : — débouté la société Rhônexpert de sa demande de prescription des dossiers [N], [M], [V], [L] et [O], — condamné la société Rhônexpert à payer la somme de 9.502,86 euros TTC au titre du préjudice financier subi par Ia société Saint Genis Auto Services, — condamné la société Rhônexpert à payer la somme de 2.832 euros TTC au titre du préjudice de perte de temps dans la gestion administrative, — ordonné l’exécution provisoire du jugement, — condamné la société Rhônexpert à payer la somme de 3.000 euros à la société Saint Genis Auto Services au titre de l’article 700 du code de procédure civile, — condamné la société Rhônexpert aux entiers dépens. Par conclusions du 29 avril 2021, fondées sur les articles 1240 et 2224 du code civil, la société Lang et Associés Rhône Alpes a demandé à la cour de : — réformer la décision déférée en toutes ses dispositions, sauf celle concernant l’absence de préjudice commercial de la société Saint Genis Auto Services qui sera confirmée, — débouter en conséquence purement et simplement la société Saint Genis Auto Services des demandes formulées à son encontre, A titre reconventionnel, — condamner la société Saint Genis Auto Services au paiement d’une somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel. S’agissant de la prescription soulevée pour six dossiers, la Société Lang et Associés a estimé que le Tribunal de Commerce a commis une erreur de droit en fixant le point de départ de la prescription au refus de prise en charge partiel de la facture, confondant l’éventuelle action que le garage pouvait avoir contre l’assureur et/ou son client concernant le paiement de tout ou partie de sa facture, et le point de départ de l’action dont est titulaire le garagiste à l’encontre de l’expert qui doit correspondre au dépôt du rapport d’expertise tel que porté à la connaissance du garagiste, date du fait permettant au garagiste d’exercer son action. Concernant les dossiers de l’espèce, l’appelante a retenu les dates suivantes : — dossier [N] : estimation en date du 16 février 2012 donc prescription au 16 février 2017 — dossier [M] : estimation en date du 24 février 2012 donc prescription au 24 février 2017 — dossier [V] : rapport d’expertise du 28 juillet 2011, donc prescription en date du 28 juillet 2016 — dossier [O] : rapport d’expertise du 10 janvier 2012 donc prescription en date du 10 janvier 2017 — dossier [L] : rapport d’expertise du 20 juillet 2011, donc prescription en date du 20 juillet 2016. Concernant les remises en pied de facture et les tarifs de géométrie, l’appelante a dénié toute responsabilité de sa part, rappelant avoir exercé son rôle d’expert qui n’a pas à valider toutes les factures du réparateur qui agit de manière unilatérale. Sur les remises en pied de facture, la Société Lang et Associés a rappelé les points suivants : — la Société SGAS était à l’époque des rapports référencée sur le site Reparmut, site qui indiquait que les garages conventionnées appliquaient des conditions tarifaires avec 6,5% de remise — la Société Lang et Associés a tenu compte des tarifs en vigueur à l’époque, notamment sur le dossier [E] et pour les véhicules appartenant à l’intimée. La concluante a rappelé que sans perte, il n’y a pas de bénéfice et que le réparateur ne peut prétendre être indemnisé pour les réparations faites sur ses propres véhicules, et ne doit pas en tirer profit d’où la remise en pied de facture appliquée par l’expert parce que l’assureur le lui a demandé. — le fait que la Société SGAS n’est pas le donneur d’ordre de la Société Lang et Associés, qualité qui appartient à la compagnie d’assurance qui en définitive indemnise son client — le fait que si l’assureur décide de ne pas appliquer certaines règles de remise ou de les appliquer, l’expert n’a pas à agir dans un sens différent sauf à engager sa responsabilité contractuelle — le fait que si le réparateur entend contester une remise, il lui revient de se rapprocher de l’assureur. Concernant les tarifs de géométrie, l’appelante a fait valoir que : — la Société SGAS applique des tarifs différents sur ce point alors que normalement seuls deux tarifs existent : l’un pour les véhicules deux roues, l’un pour les véhicules à quatre roues motrices — elle a fait son travail d’expert en retenant des montants légèrement différents de l’intimée, ce qui ne saurait constituer une faute sauf à nier le travail de l’expert . La Société Lang et Associés a versé au débat un arrêt rendu par la Cour de Cassation le 2 février 2017 concernant les relations entre expert d’assurance et réparateur, estimant qu’il consacrait la liberté d’évaluation de l’expert et n’est pas tenu d’entériner les devis et factures présentés par le réparateur — l’expert bénéficie d’une autonomie dans le cadre de sa mission, ayant également un rôle de garde-fou contre un coût de réparation anormalement non compétitif. Concernant les autres demandes, la Société Lang et Associés a estimé que les 45 dossiers visés par l’intimée renvoient aux points suivants : — une mauvaise organisation de la Société SGAS — un non-respect des délais de prise en charge par celle-ci dans la prise en charge des véhicules (réparations, livraison au client, émissions de factures ou réclamations à l’expert) — réclamations à l’expert plusieurs mois après la réalisation des réparations et la remise du véhicule à l’assuré, et sans consultation de l’expert en cas de besoin de réparations supplémentaires ou de modification de l’expertise. La Société Lang et Associés a indiqué que sa responsabilité ne pouvait être retenue au motif de ce qu’elle aurait, de manière unilatérale, modifié les montants de tarification des garagistes, alors que l’expertise est faite de manière contradictoire avec le réparateur, sa mission se terminant avec la remise de son rapport. Elle a fait valoir qu’en raison des dysfonctionnements de la Société SGAS, elle n’a pu être informée des difficultés dans le temps normal soit avant la réparation du véhicule. Concernant les préjudices invoqués, la Société Lang et Associés a indiqué que la Société SGAS n’objective aucun préjudice et ne verse pas au débat les factures critiquées, les factures complétées et les rapports critiqués, et ne remet pas d’éléments comptables pour objectiver la différence entre la facture réglée et le rapport d’expertise. * * * Par conclusions du 4 mai 2021, fondées sur l’article 1382 du code civil, la Société SGAS a demandé à la cour de : — juger que son action est recevable, — constater que la Société Lang et Associés engage sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du code civil, En conséquence : — juger qu’elle est bien fondée à solliciter la condamnation de la Société Lang et Associés à réparer l’entier dommage et les préjudices subis par la demanderesse, Confirmer le jugement déféré en ce que : — il a retenu la responsabilité de la Société Lang et Associés, — il a débouté la Société Lang et Associés de sa demande de prescription des dossiers [N], [M], [V], [L] et [O], — il a condamné la Société Lang et Associés au règlement d’une somme de 9.502,86 euros au titre du préjudice financier qu’elle a subi, Infirmer le jugement déféré en ce que : — il l’a déboutée de sa demande au titre d’un préjudice commercial (1.637,06 + 20.376,95 + aréas), — il a condamné la Société Lang et Associés à payer la somme de 2.832 euros au titre du préjudice de perte de temps dans la gestion administrative, — il a condamné la Société Lang et Associés à payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, Et statuant de nouveau : — condamner la Société Lang et Associés à lui payer la somme de 11.533,90 euros au titre de son préjudice commercial, — condamner la Société Lang et Associés à lui payer la somme de 9.558 euros TTC au titre du préjudice de perte de temps dans la gestion administrative, — condamner la Société Lang et Associés à lui payer la somme de 17.773 euros TTC au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance, suivant factures produites aux débats, Y ajoutant : — condamner la Société Lang et Associés à lui payer la somme de 6.000 euros TTC au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel, suivant factures produites aux débats, outre les dépens, En tout état de cause, — confirmer le jugement dont appel dans son intégralité, si par extraordinaire la Cour ne faisait pas droit à son appel incident, — rejeter toutes demandes financières formulées par la Société Lang et Associés en principal, intérêts, frais et accessoires. La Société SGAS a rappelé être spécialisée dans l’entretien et la réparation des véhicules automobiles légers, étant notamment membre du réseau NOBILAS, et mandatée pour intervenir sur des véhicules sinistrées auprès de MACSF, SwissLife et AREAS, prenant ainsi en charge ses véhicules et des véhicules sinistrés de clients adressés par les assurances. Elle a indiqué que la Société Lang et Associés est un interlocuteur régulier en raison de son activité. À titre liminaire, elle a visé les dispositions de l’article L410-2 du Code de Commerce prévoyant la libre fixation des prix, par le jeu de la concurrence. Elle a rappelé que si l’expert, est mené à fixer librement le coût d’un sinistre, il ne peut toutefois dicter à un réparateur ses prix. Elle a visé les dispositions de l’article R326-4 du code de la route qui prévoit qu’en cas de contestations portant sur les conclusions techniques ou sur le coût des dommages ou des réparations, l’expert doit en informer, par tout moyen à sa convenance, les parties intéressées, notamment le propriétaire et le professionnel dépositaire du véhicule, rappelant en outre que la loyauté et l’impartialité doivent présider à toute intervention de l’expert. La Société SGAS a mis en avant plusieurs manquements de la Société Lang et Associés, dénoncés à plusieurs reprises au cours de leurs relations commerciales, à savoir : — l’application unilatérale injustifiée de remise en pied de facture — le non-respect des tarifs géométrie — le non-règlement de la TVA — le refus injustifié de prise en charge en cas de complément de travaux — le refus abusif de prise en charge — le maintien de la situation en dépit de ses démarches amiables. Concernant la prescription, la Société SGAS a sollicité : — la confirmation de la décision de première instance en ce que le délai de prescription court à compter du jour où le créancier a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant d’exercer ses droits, soit dans son cas, le refus de prise en charge par l’assurance — concernant les dossiers cités dans le dispositif du premier jugement, la fixation du point départ de la prescription à compter du caractère manifeste du dommage soit la date de refus de prise en charge par l’expert le 23 novembre 2016 et non la date de dépôt du rapport puisque seul le refus de l’assureur, payeur final, permet de délimiter le litige. — la prise en compte, concernant le dossier [O], la Société SGAS a fait valoir que le point de départ de la prescription doit être fixé au 7 septembre 2012, date du refus par Monsieur [O] de payer le solde des travaux, estimant qu’il revenait à Rhonexpert de mettre son rapport en conformité avec la réalité des travaux. S’agissant des fautes reprochées à la Société Lang et Associés, la Société SGAS a visé les points suivants : ' l’application unilatérale de remise en pied de facture par l’expert sur consigne de l’assureur : La concluante a mis en avant : — l’application d’une remise systématique par l’expert en raison d’une soi-disant consigne des assureurs alors même que les remises sont différentes en fonction des rapports de la Société Lang et Associés — l’absence d’indépendance de l’appelante qui exécute les consignes des assureurs, et démontre par la mise en 'œuvre de remise, une volonté de diminution systématique du coût réel des réparations — son absence de lien avec le réseau REPARMUT, son seule référencement se faisant via un contrat Nobilas Innovation Group, sans contrepartie contractuelle — différents courriers d’assureurs indiquant l’absence de remises en pied de factures, les exemples de l’appelante ne lui étant pas applicables — le fait que dans le cadre du paiement final par l’assureur, un commissionnement est prélevé en raison du contrat les liant sauf concernant les véhicules lui appartenant en propre. ' Le non-respect des tarifs géométrie Sur ce point, la Société SGAS a rappelé les éléments suivants : — la possibilité de fixer librement ses prix, sans avoir à s’aligner sur des concurrents, situés dans le même bassin géographique sur un même trait de temps — la notification à la Société Lang et Associés de ses tarifs et l’absence de difficultés avec les assureurs concernant ceux-ci — le caractère variable des rectifications de tarifs mis en 'œuvre par la Société Lang et Associés, en fonction des véhicules, sans logique — les recours intervenus auprès de la commission régionale, notamment concernant un véhicule Twingo AR 828 EG, au terme duquel l’appelante a été désavouée au motif de ce qu’elle ne justifiait par de la diminution imposée — la mise en 'œuvre par la Société Lang et Associés de nombreuses modifications entre les rapports provisoires et définitifs, des modifications sur les tarifs de mains d''œuvre ou l’application de tarifs différents sur des dossiers semblables et de la même période — le caractère fautif de la modification unilatérale, arbitraire, et sans motif de ses tarifs traduit une faute de la part de l’appelante. ' Le non-règlement des prix de pièces des réparateurs L’intimée a rappelé : — l’existence d’une Charte des Bonnes pratiques Experts en automobile / réparateurs, a été mise en 'œuvre à compter de 2010 avec réitération en 2014, afin d’établir un équilibre entre les parties, la Société Lang et Associés étant affiliée à l’un des signataires de celle-ci — la nécessité au terme de cette charte, de respecter le principe du contradictoire pour toutes les opérations de remise en état du véhicule, et en cas de désaccords, une traçabilité des évaluations discordantes et des échanges menés à ce titre entre les parties, avec information sous 24 heures — les dysfonctionnements de la Société Lang et Associés qui ne se déplace plus pour faire des expertises, et réalise uniquement des expertises à distance et conteste ensuite les devis de réparations sauf en cas de grêle, faux sinistre, surchocs, et un refus systématique des demandes de passage — le refus de prise en compte des remarques du réparateur en dépit de la transmission des justificatifs concernant le coût des pièces et la non prise en compte du coût de main d''œuvre. ' Le refus injustifié de prise en charge en cas de compléments de travaux Elle a rappelé les éléments suivants : — l’article 5 de la charte concernant la traçabilité et la réactivité dans le suivi des travaux — les refus de déplacements de la Société Lang et Associés en dépit de ses demandes et de la complexité des situations — la clôture des dossiers par la Société Lang et Associés en dépit de ses contestations, contestations faites dans les délais — l’existence de cas où l’expert de l’assurance a finalement retenu la contestation de la Société SGAS alors que la Société Lang et Associés avait diminué sans motif la facturation, et que le rapport n’était pas contradictoire. ' Le refus abusif de prise en charge ou de dépôt de rapport La Société SGAS a indiqué les éléments suivants : — à plusieurs reprises, la Société Lang et Associés a bloqué le paiement dû par l’assureur en indiquant à tort que les rendez-vous réparateur/client n’avaient pas eu lieu, la concluante rappelant que suite à un sinistre, elle n’a pas toujours immédiatement le véhicule — la tardiveté de remise des rapports par la Société Lang et Associés dans plusieurs cas, alors que les factures dataient de plus de six mois (cas de quatre véhicules où des réclamations sont opérées le 19 décembre 2017) — la nécessité pour elle de prendre attache directement avec le service Nobilas pour faire débloquer les dossiers en question en leur adressant les factures et rapports conformes, l’attitude de la Société Lang et Associés menant de fait à une perte financière. Concernant son préjudice financier, la Société SGAS a rappelé que le principe de la réparation intégrale est posé, et que la concernant ce préjudice financier se monte à la somme de 11.533,90 euros TTC en raison de l’addition des pertes financières dans chaque dossier. La concluante a sollicité l’infirmation du jugement de première instance en ce qu’il a rejeté sa demande d’indemnisation du préjudice commercial en l’absence de preuve. Elle a indiqué que l’attitude de la Société Lang et Associés, qui dispose d’un monopole en raison de son partenariat avec Nobilas pour trois compagnies d’assurance sur le secteur (AREAS, Swisslife, MACSF) a occasionné une situation déséquilibré sur une longue période, les facturations aléatoires et arbitraires créant une perte de chiffre d’affaires. Elle a avancé ne plus avoir de missions avec ces trois assureurs depuis fin 2017, début 2018 et ne pas avoir reçu d’explications en dépit de ses demandes. L’appelante a estimé son préjudice au titre du temps perdu dans la gestion des dossiers à la somme de 9.558 euros TTC en raison du coût horaire de gestion administrative. Enfin, elle a également sollicité l’infirmation de la décision de première instance concernant l’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, versant au débat une facture de 17.773 euros et la condamnation de la Société Lang et Associés à lui verser cette somme. Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de Procédure Civile. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur la prescription soulevée par la Société Lang et Associés concernant les dossiers [N], [M], [V], [L] et [O] L’article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. En la présente espèce, s’agissant des dossiers [N], [M], [V] et [L], il convient d’en revenir au texte et de déterminer à partir de quand la Société SGAS était en mesure de déterminer qu’elle ne pourrait obtenir un paiement de manière définitive. Il ressort des éléments versés au débat, et notamment du courrier officiel du conseil de la Société SGAS, que cette dernière société a interrogé la Société Lang et Associés sur la prise en charge des factures complémentaires, ce qui est possible au regard des procédures en matière d’expertise, ce à quoi s’est opposée la Société Lang et Associés par courrier du 23 novembre 2016, indiquant qu’elle n’entendait pas revenir sur son refus de prise en charge. Le point de départ de calcul de la prescription ne saurait être celui du dépôt du rapport d’expertise par l’expert, étant rappelé qu’une phase de contestation est ensuite possible au profit du réparateur qui peut également saisir différentes instances amiables voire même l’expert conseil de l’assureur concernant le montant des réparations prises en charge. Ainsi, ce n’est qu’à compter de la réponse que la Société SGAS a eu connaissance des faits lui permettant d’envisager et d’exercer une action, s’agissant du refus de remise en cause du rapport. Dès lors, l’action concernant les dossiers [N], [M], [V] et [L] est recevable. Concernant le dossier [O], le même principe doit être retenu concernant la date de départ de la prescription. Sur ce point, la date à laquelle il est certain qu’il n’y aura pas de paiement doit être fixée au 7 septembre 2012, date à laquelle la Société SGAS a eu connaissance du courrier de refus de paiement, ce refus étant générateur d’un dommage. En conséquence, l’action concernant le dossier [O] est recevable. Le jugement déféré sera ainsi confirmé sur ce point. Sur le principe de responsabilité L’article 1382 du code civil, pour les dossiers et réclamations antérieurs au 1er octobre 2016, dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. L’article 1240 du Code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Vu la charte de bonne conduite des experts automobile / réparateur du 9 juin 2010 et du 28 janvier 2014 Les textes susvisés impliquent, en cas de demande de dédommagement au titre de la responsabilité délictuelle la preuve d’un faute, d’un dommage et d’un lien de causalité entre les deux, la faute devant être la source du dommage mis en avant. La Charte susvisée a mis en 'œuvre entre experts automobiles et réparateurs une organisation claire concernant la mise en 'œuvre des expertises, les délais à respecter mais aussi les modes de communication et d’interactions entre ces deux parties, notamment en cas de désaccord. Enfin, l’article R326-4 du Code de la route dispose que dès qu’il a connaissance d’une contestation portant sur les conclusions techniques ou sur le coût des dommages ou des réparations, l’expert doit en informer, par tout moyen à sa convenance, les parties intéressées, notamment le propriétaire et le professionnel dépositaire du véhicule. En l’état, la Société SGAS entend faire valoir que la Société Lang et Associés a adopté, de manière systématique une attitude ayant visé à diminuer les sommes qui lui sont dues en ne tenant pas compte de ses tarifs, de ses demandes de prises en charge de travaux complémentaires, mais aussi en appliquant de manière systématique des remises en pied de facture sans aucun motif. En l’état, plusieurs griefs doivent être envisagés. S’agissant de la mise en 'uvre de remise en pied de facture, les documents versés au débat, notamment les factures, permettent de constater l’application, de manière régulière sur les factures de la Société SGAS, de remise de 6,5% ou une « patente » de l’automobile de 10%. La Société Lang et Associés a remis des factures concernant d’autres sociétés de réparation avec application de remises avec différents pourcentages. Toutefois, les éléments versés au débat ne permettent pas de déterminer qu’il existe une règle, ne serait-ce que conventionnelle, permettant à la Société Lang et Associés d’appliquer de manière systématique une remise en pied de facture à l’égard de la Société SGAS. La Société Lang et Associés, qui a invoqué une directive de l’assureur sur ce point, ne rapporte pas la preuve de ce que les assureurs qui l’ont mandatée pour intervenir sur des véhicules déposés chez l’intimée, lui ont demandé de procéder de la sorte de manière systématique ou bien qu’une position conventionnelle permettait ce type de réduction. La position de la Société Lang et Associés ne peut que poser difficulté puisqu’elle remet en cause le principe d’indépendance de l’expert par rapport à l’assureur. En outre, concernant le réseau REPARMUT qui applique des réductions, il doit être relevé que la Société SGAS n’est pas liée contractuellement avec ce réseau mais est uniquement référencée par ce réseau. La Société SGAS rapporte par ailleurs la preuve que les assureurs qui la mandatent peuvent appliquer ensuite, dans les relations avec le réparateur, une commission sur les sommes versées au titre du référencement mais pas sur la facture, en remettant notamment des courriels de Nobilas, de Areas et de Innovation Group. L’examen des différentes factures versées au débat permet de constater une application systématique de remises avec un taux variable, avant l’envoi du courrier de l’avocat de la Société SGAS ayant signalé son opposition à ce fonctionnement ce qui ne peut que questionner si comme l’indique l’appelante, une règle en la matière doit être appliquée. De la sorte, en appliquant systématiquement une remise sur les factures de la Société SGAS, sans pouvoir s’appuyer sur une base légale ou contractuelle liant les parties ou un motif légitime, la Société Lang et Associés a commis une faute occasionnant une perte de revenus pour la Société SGAS qu’il conviendra d’apprécier, le grief soulevé par la Société SGAS étant fondé. S’agissant du grief portant sur le non-respect des tarifs de géométrie, il convient de rappeler qu’en application de l’article L410-2 alinéa du code de commerce, les prix des biens, produits et services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence sauf pour les cas où la loi en dispose autrement. En l’espèce, la Société SGAS justifie des tarifs appliqués dans le cadre de la réparation des véhicules, et le fait que des entreprises exerçant la même activité qu’elle aient pu adopter d’autres tarifs ne saurait avoir d’impact eu égard au principe de libre fixation des prix. La Société Lang et Associés ne verse pas au débat d’éléments permettant de rapporter la preuve que la baisse appliquée relevait d’un accord entre un assureur et le réparateur et n’objective pas non plus que les tarifs de la Société SGAS aient fait l’objet d’une critique de la part des assureurs, les éléments versés au débat démontrant uniquement une tentative de négociation. L’appelante ne rapporte pas, non plus, la preuve de ce que les tarifs en matière de géométrie font l’objet d’un plafonnement, contractualisé, avec les assureurs. Faute de pouvoir fonder la baisse des prix récurrente concernant les tarifs de géométrie, la Société Lang et Associés ne fournit aucune explication quant à son attitude qui s’oriente dès lors vers une attitude volontaire, et ne pouvant que mener à une diminution de la rémunération de la Société SGAS. Par ailleurs, il convient de relever que suite à la mise en demeure adressée par l’intimée, la Société Lang et Associés a cessé de modifier le tarif de la géométrie. En conséquence, le grief soulevé par la Société SGAS est fondé. Il conviendra d’apprécier le préjudice subi par l’intimée de ce fait. S’agissant du grief lié au non-paiement des prix de pièces du réparateur et du coût de main d''uvre, il convient d’apprécier les cas évoqués en tenant compte de la charte des bonnes pratiques entre expert et réparateur. Sur ce point, il sera rappelé que dans le cadre du rapport d’expertise, une fois les dommages retenus, le réparateur fournit un devis de réparation, et peut, en cas de non-prise en compte de certains prix ou interventions, demander à l’expert de reprendre sa position. En l’espèce, il convient de relever que sur plus de dix dossiers, la Société Lang et Associés a appliqué des tarifs différents concernant le coût des pièces mais aussi le coût des interventions, avec à chaque fois une contestation de la part de la Société SGAS concernant cette position de la Société Lang et Associés, sans correction en retour ou même sans réponse de la part de l’appelante. Il sera pointé qu’à deux reprises sur des désaccords concernant un véhicule Volvo immatriculé DW 269 VJ et un véhicule ZOE immatriculé DA 229 AW, la Société SGAS a saisi une commission de conciliation régionale et l’expert conseil de l’assureur, qui, dans les deux cas, lui ont donné raison concernant les chiffrages présentés. De même, sur plusieurs dossiers, faute de transmission du rapport d’expertise sur lequel une contestation existait, la Société SGAS a été amenée à solliciter directement l’assureur qui a retenu ses propres tarifs et non au final, ceux de l’expert. Les pièces versées au débat par la Société SGAS permettent également de constater qu’à plusieurs reprises, la Société Lang et Associés n’a pas répondu à ses demandes d’explications ou de rectifications concernant le défaut de prise en compte de certains postes. Enfin, une expertise d’un véhicule Polo Volkswagen immatriculé AE 840 DA a également fait l’objet d’une censure par l’expert conseil de l’assureur en raison du non-respect du contradictoire par la Société Lang et Associés. Le caractère répétitif des difficultés objectivées par les éléments versés au débat à savoir les échanges de courriers, courriels et fax, permet de démontrer une attitude fautive de la Société Lang et Associés qui ne fournit aucune explication claire quant à son fonctionnement mais aussi à son attitude à l’égard de la Société SGAS, cette situation caractérisant une faute de la part de la Société Lang et Associés à l’encontre de la Société SGAS. Eu égard à ce qui précède, il convient de retenir que la responsabilité délictuelle de la Société Lang et Associés est engagée à l’égard de la Société SGAS, le préjudice de cette dernière devant être apprécié pour chacun des postes réclamés. Dès lors, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a retenu la responsabilité délictuelle de la Société Lang et Associés. Sur les demandes d’indemnisation de la Société SGAS — Concernant le préjudice financier Sur ce point, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a retenu la somme de 9.502,86 euros, cette somme étant fondée sur les éléments non pris en compte dans le cadre des facturations et menant de fait à une indemnisation. — Concernant le préjudice commercial Sur ce point, il convient d’infirmer la décision rendue. La Société SGAS objective le fait que depuis ses réclamations, elle ne reçoit plus de dossiers en provenance de plusieurs assureurs. Toutefois, il ne peut être fait droit à l’intégralité de sa demande puisque le principe de libre choix des prestataires dans le cadre du commerce ne saurait lui garantir de manière certaine un chiffre d’affaires en provenance des différents assureurs avec lesquels elle travaillait auparavant. Seule une perte de chance à hauteur de 20% devra être retenue au titre de la somme demandée. Ainsi, la Société Lang et Associés sera condamnée à payer à la Société SGAS la somme de 2.306,78 euros. — Concernant le coût de la gestion administrative Sur ce point, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu’elle a fait une juste appréciation du préjudice de la Société SGAS, cette dernière ne fournissant en outre aucun élément comptable ou objectif permettant de retenir le coût horaire qu’elle sollicite. — Concernant la somme au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile accordée en première instance Il n’y a pas lieu d’infirmer la décision déférée sur ce point en ce que les premiers juges ont fait une juste appréciation en équité de la situation, la somme accordée étant satisfactoire. Sur les autres demandes La Société Lang et Associés, qui succombe en la première instance, sera condamnée à supporter les dépens de la procédure d’appel. L’équité commande d’accorder à la Société SGAS une indemnisation sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile. La Société Lang et Associés sera condamnée à lui verser la somme de 5.000 euros. PAR CES MOTIFS La cour, Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation au titre du préjudice commercial, Statuant à nouveau sur ce point Condamne la SAS Lang et Associés à payer à la SARL Saint Genis Auto Services la somme de 2.306,78 euros au titre de la perte de chance concernant le préjudice commercial, Y ajoutant Condamne la SAS Lang et Associés à supporter les entiers dépens de la présente instance, Condamne la SAS Lang et Associés à payer à la SARL Saint Genis Auto Services la somme de 5.000 euros à titre d’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile. LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
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